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https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2020.09.25.20201772v1

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Thème

Virologie Infectiologie

Que retenir de cet article, en 1-2 phrases ?

Le log de l’AUC de la charge virale dans les voies aériennes supérieures est un bon prédicteur de la contagiosité.
Si un traitement est très efficace (> 90 %) et s’il est donné dès l’apparition des symptômes, alors il peut réduire notablement la contagiosité.
La longue durée de vie de la charge virale dans les voies inférieures serait due au renouvellement des cellules cibles ou à une diffusion spatiale par sauts au sein de l’organisme.

Objectifs de l’étude / Questions abordées

Modélisation de l’évolution de la charge virale en parallèle dans les voies aériennes inférieures et supérieures, couplage avec la contagiosité et introduction de mécanismes pour reproduire les rebonds de charge virale observés dans les voies aériennes inférieures.

Méthode

Le modèle de contagiosité du patient est construit en reliant tout d’abord la charge virale dans les voies supérieures au nombre de virions dans des gouttelettes d’aérosol, puis en établissant un modèle probabiliste de type Poisson d’infection en fonction du nombre de particules virales reçues et de la probabilité qu’une particule virale réussisse à infecter une cellule.

La charge virale est modélisée par un système d’équations différentielles non-linéaires, ordinaires (cœur du modèle : le modèle virologique TCL). Le modèle porte sur plusieurs aspects de l’infection des voies respiratoires par le virus SARS-CoV-2 :

  • la dynamique de la charge virale, en prenant en compte la coexistence de deux populations de cellules cibles du virus (voies supérieures et inférieures) ;
  • la dynamique des symptômes et de leur apparition ;
  • la probabilité qu’une personne porteuse du virus soit contagieuse. La dynamique de la charge virale dans les voies supérieures est supposée autonome (le transport des voies supérieures vers les voies inférieures est négligeable par rapport à l’émission des particules vers l’extérieur des voies respiratoires).

Données utilisées : suivi longitudinal de charge virale dans les prélèvements nasaux et les expectorations de patients, reprises de la littérature.

Le modèle est ajusté aux données en utilisant un modèle non-linéaire à effets mixtes pour les quinze premiers jours, puis patient par patient.

Résultats principaux

Dans une série de simulations, l’influence d’un traitement sur la contagiosité a été étudiée, en fonction du paramètre du modèle sur lequel il joue : diminution de la réplication virale ou diminution de l’entrée du virus dans la cellule. Ces simulations suggèrent d’une part qu’il faut un traitement très efficace et pris très précocement (dès l’apparition des symptômes) pour diminuer notablement la contagiosité, d’autre part qu’un traitement modérément efficace pourrait allonger cette période de contagiosité.

Les résultats obtenus suggèrent que le log de l’AUC de la charge virale des voies aériennes supérieures est le meilleur indicateur de la contagiosité parmi ceux étudiés, que la saturation du nombre de particules virales dans les gouttelettes d’aérosol est un point clef de l’évolution temporelle de la contagiosité, et que les rebonds s’expliqueraient par le renouvellement des populations de cellules cibles (prolifération ou diffusion spatiale « par sauts ») plus que par la modulation de la réponse immunitaire.

Commentaire / brève évaluation, limites, ouvertures possibles

Le choix d’une dynamique autonome pour la charge virale des voies supérieures est validé dans la phase initiale de l’infection (première quinzaine). L’ajustement des paramètres du modèle à effets mixtes est réalisé sur les données longitudinales de 8 patients, mais le détail des paramètres ajustés et de ceux assortis d’un effet mixte n’apparaît pas clairement dans l’article. On peut également noter qu’il n’y a aucune donnée pour la phase de croissance de la charge virale, ce qui rend l’estimation d’une partie des paramètres délicate.

La façon dont la durée d’incubation est modélisée est discutable. Dans le modèle, c’est un paramètre qui influence l’infectiosité et le taux de production, et non l’inverse, ce qui semblerait plus intuitif.

Si ce modèle décrit de façon acceptable les deux premières semaines après la contagion, il n’en va pas de même pour l’évolution ultérieure qui montre, pour les voies inférieures, des rebonds de charge virale qui ne peuvent pas être expliqués par ce modèle. Trois origines de ces rebonds sont proposées, basées sur l’ajout d’un modèle d’immunité adaptative : l’existence de cellules réfractaires pendant une certaine fenêtre temporelle, le renouvellement des cellules détruites et une diffusion spatiale “par bonds” des virions.

On notera que les modèles sont comparés sur la base de l’AIC, mais avec une formule suggérée qui est celle des modèles de régression linéaire ordinaire (moindres carrés) et non avec la définition fondée sur la vraisemblance : il n’est donc pas clair que les comparaisons soient réellement pertinentes, puisque le modèle est ici non-linéaire et à effets mixtes, avec une vraisemblance plus complexe que celle utilisée pour le calcul.