URL

https://doi.org/10.1098/rsif.2020.0803  

Type d’article

Article peer-reviewed  

Thème

Stratégie de contrôle
Immunité
Infectiologie  

Que retenir de cet article, en 1-2 phrases ?

L’article détermine la stratégie optimale de déploiement de mesures non-pharmaceutiques de mitigation d’une épidémie, permettant d’atteindre l’immunité collective le plus rapidement possible, en conservant le nombre total d’infectés en deçà d’un seuil fixé représentant la capacité de traitement hospitalière.  

Objectifs de l’étude / Questions abordées 

L’article considère un modèle SIR d’épidémie classique. Une variable de contrôle permet d’agir sur le taux d’infection de l’épidémie, représentant l’introduction de mesures de contrôles (masque, fermeture des commerces, confinement…). Ces mesures de contrôle étant associées à des coûts importants, les auteurs étudient une stratégie rendant la plus courte possible la période pendant laquelle ces mesures s’appliquent, tout en conservant le nombre de contaminés en-deçà de la capacité limite de traitement. Ils comparent ensuite leur stratégie optimale à celle mise en place par les différentes provinces mexicaines.

Méthode

Pour déterminer ces stratégies optimales, les auteurs s’appuient sur une résolution implicite des équations du modèle SIR, permettant de déterminer le contrôle optimal menant à la réalisation des objectifs.

Résultats principaux

Le contrôle optimal de l’épidémie peut être décrit comme suit :

  • Dans une première période, aucune mesure de contrôle n’est introduite, pour permettre à l’épidémie de se répandre plus rapidement dans la population et ainsi arriver plus rapidement à une immunité collective.
  • Puis les mesures de confinement les plus restrictives possibles sont mises en place, afin de limiter la croissance du nombre de contaminés jusqu’à atteindre la limite de capacité hospitalière
  • Ensuite, les mesures sont progressivement relâchées pour que le nombre de contaminés reste à tout temps égal à la capacité hospitalière maximale.
  • Enfin, lorsqu’une portion suffisante de la population a été immunisée, des mesures très restrictives sont à nouveau mises en place pour supprimer aussi rapidement que possible l’épidémie.

Lorsque les auteurs comparent leur stratégie optimale à celles mises en place par les différentes régions mexicaines, ils constatent que les mesures mises en place sont systématiquement plus strictes que leurs préconisations.  

Commentaire / brève évaluation, limites, ouvertures possibles

L’aspect mathématique de cette étude est intéressant, mais l’application que les auteurs en font aux données réelles soulève plusieurs questions :

  • Les auteurs notent que le contrôle mis en place par les régions mexicaines n’est pas le même que leur contrôle optimal. Cependant, cette différence peut s’expliquer par un objectif de contrôle différent : minimiser la durée de l’épidémie implique de laisser le virus circuler ; minimiser le nombre total de contaminés ou de morts est souvent réalisé conjointement à une minimisation des dommages à l’économie.
  • Le choix de représenter la capacité hospitalière comme une limite fixe est discutable. En effet, d’une part cette capacité pourrait être étendue en cas de besoin, et d’autre part le fait de maintenir une pression maximale sur l’hôpital peut avoir l’effet de diminuer cette capacité, puisque le personnel médical sera également plus touché si le nombre de contaminés est plus important.
  • Supposer que la population suivra exactement les recommandations gouvernementales est également une limite du modèle. Il est ainsi probable que lors de la première phase de croissance épidémique, les populations se confinent pour éviter la maladie. Lorsque l’immunité collective est proche, elles suivraient moins les recommandations de prudence.
  • La stratégie de contrôle optimale suppose une connaissance parfaite du nombre de contaminés dans la population, ce qui est un autre obstacle important. En effet, de par sa dynamique exponentielle, une erreur faible faite dans le contrôle à un temps antérieur se propage au cours du temps. Considérer des versions stochastiques du modèle proposé par les auteurs semble non-trivial, notamment en supposant une imprécision de mesure de la prévalence de la maladie au cours du temps.

Au-delà de ces commentaires, signalons une ouverture possible: l’ajout d’une dépendance régionale serait un plus pour le modèle proposé par les auteurs. En particulier, lorsqu’une région dotée de capacités hospitalières plus importantes laisse l’épidémie se propager plus longtemps, peut-on quantifier l’impact sur un territoire voisin avec une capacité hospitalière plus faible ?