OUSTALOUP Alain (Universite Bordeaux, CNRS, IMS UMR 5218, Bordeaux
INP/ENSEIRB-MATMECA), LEVRON François (Universite Bordeaux, CNRS, IMB UMR 5251, Bordeaux INP), VICTOR Stéphane (Universite Bordeaux, CNRS, IMS UMR 5218, Bordeaux
INP/ENSEIRB-MATMECA), DUGARD Luc (Universite Grenoble Alpes, CNRS, Grenoble INP, GIPSA-Lab)

https://arxiv.org/abs/2102.13471

Ce papier propose un modèle mathématique déterministe très simple, qui, en utilisant une loi de puissance, est un modèle à puissance non entière (ou fractionnaire), ou modèle FPM (Fractional Power Model). Un tel modèle, en puissance non entière du temps, soit t^m à des constantes près, permet de représenter quotidiennement, avec une bonne précision, la totalité des contaminés. Bien qu’enrichi par de la connaissance à travers une structure interne basée sur une suite géométrique « à raison variable », le modèle (dans sa représentation non entière) ne comporte que trois paramètres, dont la puissance non entière, m, qui, selon sa valeur, détermine à elle seule une aggravation ou une amélioration de la propagation virale. Sa simplicité provient de la loi de puissance, t^m, qui exprime simplement la dynamique singulière de l’opérateur de dérivation ou intégration non entière, de grande compacité paramétrique, qui régit les phénomènes de diffusion et, comme montré dans ce papier, les phénomènes de propagation par contamination. Le modèle proposé est en effet validé avec les données officielles du Ministère Français de la santé sur la propagation de Covid-19. Utilisé en prédiction, il permet de bien justifier le choix d’un confinement, sans lequel la propagation aurait fortement empiré. La comparaison de ce modèle en t^m avec deux modèles connus ayant le même nombre de paramètres, montre bien que sa représentativité des données réelles est meilleure ou plus générale. Enfin, dans un contexte plus fondamental et notamment en termes de complexité et de simplicité, une action autofiltrante permet de montrer la compatibilité entre la complexité interne que présentent la structure interne et son comportement stochastique, et la simplicité globale qu’offre, de manière déterministe, le modèle en t^m : comme quoi, la puissance non entière d’une loi de puissance est bien un marqueur de la complexité.

Idée précise de la contribution

Tout système réel présente naturellement une organisation interne qui le réalise ou le synthétise, par exemple physiquement ou chimiquement. Cette organisation ou structure interne, conditionne les grandeurs caractéristiques du système. Dans une approche systémique relevant de la théorie des systèmes, ces grandeurs sont représentées par des variables internes et externes qui dépendent de paramètres structuraux et qui figurent généralement dans un schéma fonctionnel.
Aussi, s’inscrivant dans une telle approche, l’idée de l’article est de proposer un modèle global en loi de puissance, de la forme A+Bt^m, de nature à représenter la dynamique des phénomènes complexes, et de le doter d’une structure interne, explicative, conforme à une réalité quotidienne (de nature comptable).
Plus précisément, concernant la nature d’un tel modèle, l’objectif est d’introduire une structure interne (ou modèle explicatif)

  • qui, à travers chacun de ses termes (voir ci-après), représente bien l’enregistrement quotidien des nouveaux contaminés

  • et qui, à travers l’ensemble de ses termes (donc globalement), donne l’évolution réelle du nombre total des nouveaux contaminés, à savoir l’évolution que le modèle est censé représenter.

    Permettant ainsi de formaliser le procédé d’enregistrement quotidien des nouveaux contaminés, et de représenter jour après jour le nombre de tous les nouveaux contaminés, la structure interne est définie, mathématiquement, par la somme, sk, des k+1 premiers termes d’une suite géométrique “à raison variable”, soit :

u0+u0 q1+u0 q1 q2+⋯+ u0 q1…qk, avec u0 , qk>0 ,

qk étant le rapport des nouveaux contaminés entre deux jours consécutifs k-1 et k.
Alors que le terme général de la suite, uk=u0 q1…qk, représente le nombre des nouveaux contaminés enregistrés au jour k (u0 étant relatif au jour 0), la somme, sk, associée à la suite, représente la somme des nouveaux contaminés enregistrés du jour 0 au jour k ou, plus simplement, la somme des nouveaux contaminés au jour k.
A travers les produits des qk et la somme des uk de l’expression de la structure interne, sk, qui confèrent un double effet autofiltrant à la structure, les fluctuations aléatoires que peuvent présenter les différents rapports, qk, ne perturbent pratiquement pas la somme, sk, ou plus précisément le résultat de la somme. Ainsi, le modèle qui est censé représenter l’évolution de cette somme (ou plus précisément de son résultat), peut être un modèle essentiellement déterministe, justifiant ainsi la nature du modèle proposé dans l’article. Si la structure interne permet donc d’expliquer le caractère déterministe du comportement global, elle permet aussi d’expliquer la forme en t^m de ce comportement : avec sa façon comptable de capturer une réalité bruitée, ce type de structure permet en effet, par analogie, d’inscrire le comportement global dans une classe de phénomènes complexes régis par une loi de puissance.
Issu du domaine du non-entier ou plus précisément du comportement de l’opérateur d’intégration fractionnaire, et particulièrement important en modélisation des systèmes et phénomènes complexes, le modèle proposé est bien un modèle déterministe. Mathématiquement, il est défini par une fonction affine de la loi de puissance, t^m. Cette fonction possède donc trois paramètres, parmi lesquels m est un paramètre déterminant ou « de haut niveau », qui détermine, à lui seul, une progression (convexité) ou une régression (concavité) de l’épidémie, selon qu’il est supérieur ou inférieur à un.